L’histoire économique a toujours supposé un lien direct entre brevets et
innovation, en basant beaucoup de leur chronologie sur des archives de l’Office
des Brevets. Beaucoup de ce que nous pensons savoir vient de ces archives –
qu’Eli Whitney a inventé l'égraineuse à coton, que les frères Wright ont été
les premiers à voler, que Thomas Edison détient le record du nombre
d’inventions parce qu’il détient le plus de brevets.
Mais est-ce vrai ? Beaucoup de détenteurs de brevets le pensent. Ils s’y
agrippent comme si leur vie en dépendait et les défendent de toute attaque.
Certaines entreprises accumulent les brevets comme un trésor de guerre à des
fins purement défensives. Plus vous en possédez, plus vous pouvez intimider vos
concurrents afin qu’ils ne marchent pas sur vos plates-bandes.
Alors quelle importance ont les brevets quand il s’agit de favoriser
l’innovation ? La réponse n’est pas beaucoup, selon quatre économistes de l’Université
Technique de Lisbonne. Ils diffusent leurs recherches sur une plateforme
sponsorisée par la Réserve Fédérale de St Louis. Ils ont examiné les
meilleures innovations entre 1977 et 2004, listées par le prix R&D dans la
revue Research and Development. Ils ont comparé 3 000 innovations à des brevets
pour déterminer le rapport qu’il y avait.
Leurs conclusions sont remarquables : 9 innovations sur 10 n’ont jamais
été brevetées.
Elles ont juste été fabriquées puis vendues, et ont changé le monde. En d’autres termes, c’est le marché qui innove, pas la bureaucratie. Les auteurs admettent qu’il y a peut-être eu des copies de ces mêmes innovations qui ont été brevetées. Mais en fait cela ne change pas les implications de l’étude, à savoir qu’il n’y a aucun lien entre l'existence des brevets et le sens et le rythme de l’innovation.
Article original titré Does Innovation
Require the Patent Office? publié par Laissez-Faire
Elles ont juste été fabriquées puis vendues, et ont changé le monde. En d’autres termes, c’est le marché qui innove, pas la bureaucratie. Les auteurs admettent qu’il y a peut-être eu des copies de ces mêmes innovations qui ont été brevetées. Mais en fait cela ne change pas les implications de l’étude, à savoir qu’il n’y a aucun lien entre l'existence des brevets et le sens et le rythme de l’innovation.
En fouillant dans leurs références, on trouve d’autres pépites
d’information. Il s’avère que d’autres chercheurs ont abouti aux mêmes
conclusions au début du 20ème siècle, et de même en remontant jusqu’au milieu
du 19ème siècle. Les résultats sont tous similaires : il y a les brevets et il
y a les innovations, mais ils ont peu voire rien en commun.
Ces résultats sont une illustration du gouffre qu’il y a entre les
sciences populaires et la vraie science. Dans la version populaire, les gens
s’imaginent qu’ils vont rêver d’une idée, déposer une demande de brevet, puis
fabriquer et devenir millionnaire. La réalité du terrain c’est que 90% des
brevets ne servent à rien. Ils sont juste bons à accrocher au mur, mais c’est à
peu près tout.
Les brevets qui servent vraiment dans ce monde sont utilisés comme des
armes par les grosses entreprises pour faire du tort à leurs concurrents. Ils
ne sont pas la raison du succès d’une affaire ; c’est tout l’inverse. Plus
l’entreprise est grosse, plus elle est impliquée dans le marché des brevets
pour l’aider à maintenir sa place sur le marché. Ils intentent des procès qui
durent des années et qui se règlent finalement par un arrangement financier.
Pendant ce temps, au lieu de mettre le paquet sur l’innovation, ils la mettent
sur pause. Tant que le brevet est là, les autres innovations sont légalement
contraintes de ne pas faire ce qu’elles font le mieux.
L’industrie des logiciels est un excellent exemple. Dans les années 1970
et 1980, les brevets étaient rares voire inexistants. Les sociétés gagnaient de
l’argent en créant et en vendant, exactement comme cela se fait normalement
dans une libre entreprise. Puis, l’industrie s’est développée. Des gens comme
Steve Jobs, qui auparavant vantait ce talent de voler les idées des autres, ont
commencé à menacer d’autres sociétés de procès. Les jeunes programmeurs
d’aujourd’hui savent très bien que si jamais ils inventent quelque chose qui
menace une grosse entreprise, la petite société sera écrasée.
Vous pouvez lire l’article
au complet sur http://www.contrepoints.org
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